Parti courir, no 35. 2 juillet 2020.
Je suis parti courir. Quand je suis revenu, Elvis était dans ma cour. Si vous faites partie de ceux qui croient qu’Elvis est toujours vivant, sur une ile, avec Marylin Monroe, John Kennedy et James Dean, ravisez-vous, il était hier sur la rue Bourgogne, à Chambly.
Ce n’était pas tout à fait ma cour. Ce n’était pas tout à fait Elvis. Tout de même, quand on arrive un peu essoufflé, entendre « Suspicious Mind » à cordes vocales que veux-tu, ça frappe.
D’après ce que je comprends, un groupe de voisins derrière chez moi s’étaient organisés une petite fête. Quelqu’un a eu l’idée d’inviter (insérez ici votre choix : le beau-frère, le coloc, le collègue de la shop, le gars qui joue au centre, une vague connaissance ou même simplement chose-là) qui « chante pareil comme Elvis » pour assurer la partie divertissement de l’affaire.
Dans la vie on a ce qu’on mérite. Ce groupe-là a sûrement de quoi à se reprocher.
Le gars était pas si mauvais. Non, on ne parle pas d’Elvis Gratton ou même d’Elvis Wong. Mais disons qu’il appartenait clairement plus à la Rive-Sud qu’à Las Vegas. Un produit local. Un Elvis du terroir. Disons, Elvis… Bessette.
Répertoire OK, tous les classiques y sont passés. Assez de trémolo pour qu’on se demande si c’est lui ou le système de son qui bourdonne. C’est dans les notes hautes que ça se corsait. Le King de la rue Bourgogne avait pas mal d’ambition. C’est bien. Mais encore faut-il avoir les moyens de ses ambitions.
En un mot : non.
Plus d’une fois j’ai vu arriver le moment de bravoure, la haute un peu, beaucoup risquée. À chaque fois j’ai pensé qu’il allait résister à la tentation, reconnaître le piège, Jacques Brel aurait parlé de « l’inaccessible étoile ». Ben non, mon Bessette s’est entêté à toutes les essayer.
Dans le meilleur des cas ça a donné une espèce de « Woooheuheuheu » en descendant d’un ton. Un truc de pro sans doute. Généralement, on a plutôt eu une mini pause dans la prestation, le temps pour l’artiste de reprendre son souffle, se donner contenance et remettre le breaker du larynx à « on ».
À l’école on lui aurait donné A+ pour l’effort et E pour le résultat. Avec la mention « Peut faire mieux ». Les parents devront signer le bulletin.
Après un bon bout de temps (ça a davantage paru un LONG bout de temps) le King de la rue Bourgogne a décidé que c’était suffisant. Il a fini ça comme un champion avec My Way. « I did it… my… way-ay-aaay!». Justement, c’est ça le problème.
Il n’a pas eu de rappel. Pas nécessaire, on va s’en rappeler.
Note : pour les sceptiques, cliquez sur la vidéo qui accompagne le texte.