POUR ÉCOUTER LA CHRONIQUE

Parti courir, no 42. 9 août 2020.

Je suis parti courir. De retour d’un court séjour à Bromont, question de changer d’air. C’est joli, Bromont. Le Vieux-Bromont, surtout. De belles bâtisses d’inspirations anglaises, des maisons qui sont devenues des bistros, une rue principale ou on se croise à respectueuse distance et une église, portes grandes ouvertes même un mercredi soir. 

On est entrés, par curiosité et pour allumer un lampion. On est comme ça, on entre dans une église, on allume un lampion. On n’a jamais trop de lampions au feu. D’autant plus qu’avec notre taux de fréquentation, c’est pas comme si on allait accélérer le réchauffement de la planète. 

Ceci dit, ce qui a retenu mon attention c’est plutôt le bénitier, vide, sauf un flacon de Purel. J’en déduis que l’eau bénite ne résiste pas à la Covid. Quelle époque! On devra ajouter un chapitre à la Bible. On connaissait l’histoire de l’eau changée en vin, faudra maintenant parler du changement de l’eau bénite en Purel. 

J’ai une relation ambigüe avec à l’eau bénite. D’une part, c’est l’objet d’une des attentions les plus gentilles que j’ai vue dans un commerce. À l’époque on louait un VR pour notre équipe du Grand défi Pierre Lavoie. Les locateurs s’assuraient toujours que le VR avait à son bord une minuscule bouteille d’eau bénite, une tradition qui venait des fondateurs de la business. Ça c’est le bon côté. 

L’autre côté, il remonte à mon enfance à Chambord. Avec un ami (que je ne nommerai pas pour préserver sa réputation. La mienne, elle est déjà perdue), on avait pu entrer dans l’église vide. Il y avait, près des cordes qui servaient à « tirer » les cloches, un grand récipient avec un robinet. Rempli d’eau bénite. Faut croire que les gens en faisaient à l’époque une consommation suffisante pour justifier de l’eau bénite en vrac. 

Moi et X, donc, on rentre, on voit le robinet, évidemment on l’ouvre. Irrésistible. Ça commence à couler. Assez fort tout de même. On referme… mais ça refuse de sceller complètement. On a beau forcer, le débit a ralenti mais ça s’écoule au goutte à goutte. 

On a fait ce que tout enfant responsable aurait fait. On s’est sauvés sans le dire à personne! J’ai été responsable dans le sens de « responsable de ma santé » et si vous aviez vu la largeur des mains de mon père, vous auriez pris la même décision. 

Je n’ai jamais su l’étendue des dégâts. Le curé Bergeron a dû s’en rendre compte et appeler le bedeau Lalancette pour ramasser la flaque (j’espère qu’on parlait encore d’une flaque, pas d’un lac). 

D’ailleurs, tu ramasses ça avec quoi, de l’eau bénite? Pas une vulgaire moppe athée, j’espère. Est-ce que le Vatican fournit à chaque église un kit de ramassage des déversements avec des éponges sacrées et des guénilles liturgiques dans un coffre à outils en velours rouge? 

Chose certaine, la paroisse de Bromont a vu juste. Avec moi dans les parages, le Purel, c’est pas mal moins risqué.

Catégories : Août 2020