Parti courir, no 51. 11 octobre 2020.
Je suis parti courir. Après ma balle. Dans le bois, un peu à la droite de l’allée, là où elle était disparue, après une trajectoire pas tout à fait en ligne droite, pas tout à fait dans la bonne direction et pas tout à fait de la bonne distance. Un coup de départ manqué? Pas tout à fait.
Je n’étais pas réchauffé. C’est mon excuse. Normal, le canal météo prévoyait hier « deux degrés ressentis » à l’heure du premier élan. Qui a dit qu’ils se trompent toujours? Sept degrés avec un petit vent, ça doit bien donner « deux ressentis».
Frais, vous me direz, mais jouable. Surtout en fin de saison.
Comme plusieurs, j’ai redécouvert le golf cet été, un rare sport praticable dans des conditions normales. Presque tous les lundis matin, avec mon vieux chum Alain, un excellent partenaire de golf. On compte pas trop nos coups, pas obligé de faire la conversation si on n’a rien à raconter et, côté distanciation sociale, rien à craindre, on frappe rarement tous les deux dans le même secteur.
On a bien dû jouer une douzaine de fois comme ça, suffisamment pour développer quelques mots codes. Par exemple l’utilisation du mot « virgule ».
Au golf, un des coups les plus frustrants c’est le genre de petite approche, à 10-20 verges du vert (en langage de golf, un « chip »). Le drapeau est tout près, tu commences déjà à penser au coup roulé qui s’en vient et là, tu rates complétement. Trop de pelouse, pas assez de concentration, le coup d’approche est devenu un coup d’éloignement. Ce qui était « un petit chip niaiseux » est devenu, « un petit chip (virgule), niaiseux ». En une virgule, on est passé du coup de routine à la séance d’autoflagellation.
Comme on est tous les deux assez capables de réussir à manquer ce coup-là (oui, « réussir à manquer »), on a pris nos habitudes. On fait semblant de pas avoir trop vu le coup échappé et en apercevant la balle clairement pas où elle devait aller, on s’informe :
- Une virgule?
- Ouais, une virgule!
Frustrant sur le moment mais, bon, on est dehors, le soleil est sorti, le mercure a fini par monter jusqu’à dix. Il reste encore plusieurs trous à jouer. On profite du moment en s’accrochant à l’été de toutes nos forces, comme tous ces gens que j’ai vus aujourd’hui marcher dans les parcs ou jaser à distance assis sur l’asphalte de leur stationnement.
Si bien qu’on va remettre ça demain. On prévoit du temps ensoleillé et quelque chose comme cinq ou six degrés au départ à 7h37. On partira en frissonnant, avec la tuque, les gants et, bien sûr, notre réserve de virgules.