Parti courir, no 6. 4 avril 2020.
Je suis parti courir. 100 mètres plus tard, j’étais arrêté. Pas à cause de mon pantalon, je vous rassure tout de suite. Tout est revenu sous contrôle de ce côté-là, merci de vous en informer. En fait, je venais de croiser Guy Marcil, un vieux chum de vélo.
- Hey, Guy Marcil!
- Tu pars courir, vas-tu raconter une autre histoire?
- Je vais voir en cours de route, peut-être que je parlerai de toi.
Je le disais un peu à la blague mais finalement, oui, Guy Marcil, je parle de toi. Guy c’est un mordu de vélo. Mon premier encadreur quand j’ai commencé à rouler en groupe, à Chambly, il y a plus de 20 ans.
Non seulement il m’a montré comment rouler en peloton, il m’a même évité une blessure: on roulait vite, lui juste devant moi. Il a passé dans un trou, ça a cogné tellement dur que sa roue arrière est sortie de son ancrage. Même si vous ne connaissez rien au vélo, vous pouvez imaginer qu’une roue arrière défaite, ça ralentit son homme assez sec.
Comme je suivais à une roue de distance, je suis rentré dedans. Zéro freinage, bang dedans! Une seconde il est là à sacrer après le trou, la seconde d’après, il nous reçoit, mon vélo et moi. Pas délicatement, je vous jure. J’ai toujours pensé qu’il avait dû avoir le « Shimano » de mes poignées de freins imprimé dans le dos pendant des mois. Moi, il m’a si généreusement bloqué que je n’ai absolument rien eu. On a replacé sa roue, laissé partir le reste de la gang et rentré tranquillement, en jasant, à la maison.
Depuis, régulièrement comme aujourd’hui, je croise Guy Marcil. Moins durement, heureusement. On a même travaillé ensemble un bout de temps dans une boutique de vélo, deux retraités qui s’amusaient à réparer et vendre des « becyk ».
C’est curieux comme il y a des gens qu’on ne voit jamais en dehors de circonstances bien précises et d’autres qu’on croise souvent. Comme Guy. Ou Tom Hopkins.
Je joue au hockey à Chambly avec le même groupe depuis 1996. 22 joueurs réguliers en plus de remplaçants qui sont souvent là. Tous habitent à Chambly et les environs. On se voit pendant la saison, les mercredis soir. Étonnamment, je ne les rencontre pratiquement jamais en dehors de l’aréna. Sauf Tom Hopkins, un gars super sympathique que je vois, lui, partout. À l’épicerie, sur la rue, à la station-service, au restaurant, pas de surprise, Tom est là.
Déjà qu’au hockey je le croise pas mal et que j’en ai plein les bras. Tom est, comment vous dire, massif. Un pompier à la retraite, il a des gros os, mettons. Et un peu d’enrobage. Un attaquant. Son jeu favori c’est de venir se planter devant le but. Moi, en défense, je dois essayer de le déplacer. Peine perdue. Je l’ai surnommé « la roulotte ». Le devant du but, c’est son terrain de camping.
En courant aujourd’hui j’ai réalisé que c’est ça qui me manque. Croiser Guy sur la route, Tom au coin de la rue. Les rencontres. La normalité qui semble tellement loin présentement. Le numérique, c’est OK, mais quand il faut s’envoyer des liens internet pour se voir, on est ailleurs. Ou nulle part.
Bon, ça finira bien par passer. En attendant, puisque qu’en écoutant les points de presse vous êtes devenus familiers avec les chiffres, sachez qu’à Chambly, on note une augmentation significative de l’indice TB!/Hc*.
C’est bon, ça. On lâche pas!
*TB!/Hc : le Taux de « Bonjour! »/Habitant croisé